Introduction

L’accessibilité numérique est un enjeu essentiel dans une société où le digital est omniprésent. Pourtant, les personnes en situation de handicap, notamment celles atteintes de troubles visuels et auditifs, rencontrent encore de nombreux obstacles pour accéder aux contenus et services en ligne. Ces difficultés soulignent la nécessité de mettre en place des pratiques inclusives pour garantir un accès égalitaire à l’information et aux services numériques.

Cet article explore les principaux types de troubles auditifs et visuels et propose des bonnes pratiques pour améliorer l’accessibilité numérique. Ces recommandations ne sont pas exhaustives : il existe de nombreuses autres actions à mettre en place. L’accessibilité numérique s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue. Cet article s’inscrit notamment dans une série d’article sur l’accessibilité, traitant de différents troubles perturbants la navigation sur les sites web. Cet article fait partie d’une série dédiée à l’accessibilité numérique, qui explore différents troubles impactant la navigation sur les sites web. Chez 6TM, nous faisons de cet enjeu une priorité, en progressant nous-mêmes au quotidien sur ces sujets pour offrir à nos clients des solutions toujours plus inclusives.

1. Comprendre les troubles et handicaps visuels et auditifs

Les troubles auditifs et visuels englobent une variété de conditions affectant la perception sensorielle, chacune présentant des défis spécifiques en matière d’accessibilité numérique.

1.1. Troubles auditifs

Les troubles auditifs peuvent prendre des formes variées et ne signifient pas toujours une surdité totale. Il existe de nombreuses situations où l’audition est partiellement altérée, que ce soit de manière temporaire ou permanente. Certaines personnes naissent avec un déficit auditif, d’autres perdent progressivement l’ouïe avec l’âge. C’est le cas de la presbyacousie, une forme de dégradation naturelle de l’audition liée au vieillissement. Comprendre cette variété de profils est essentiel pour concevoir des interfaces web adaptées à chacun.

On distingue plusieurs types de surdité :

  • La surdité de transmission, causée par une obstruction ou une anomalie de l’oreille externe ou moyenne, empêchant le son de parvenir correctement à l’oreille interne.
  • La surdité de perception (ou neurosensorielle), due à un dysfonctionnement de l’oreille interne ou du nerf auditif, altérant la perception et l’interprétation des sons.
  • La surdité mixte, qui combine les deux types précédents.

Certaines affections complémentaires peuvent aussi perturber l’audition :

  • Les acouphènes, qui se manifestent par des bruits parasites (sifflements, bourdonnements) sans source sonore externe.
  • L’hyperacousie, une hypersensibilité auditive qui rend certains sons du quotidien insupportables.

Quels sont les besoins ?

La diversité de ces troubles implique des besoins très variés en termes d’accessibilité numérique. Une personne malentendante ou sourde peut rencontrer des difficultés à accéder à des contenus sonores ou à des interfaces qui reposent exclusivement sur l’audio. Il est donc essentiel de concevoir des sites et applications web qui proposent des alternatives textuelles ou visuelles aux contenus auditifs, et qui permettent une interaction fluide sans recours exclusif au son.

1.2. Troubles visuels

Les troubles visuels peuvent aller d’une baisse modérée de l’acuité à une cécité totale. De nombreuses personnes rencontrent des difficultés visuelles sans être considérées comme aveugles, notamment avec l’âge. Il est donc essentiel de comprendre la diversité de ces troubles pour concevoir des interfaces accessibles au plus grand nombre.

Voici quelques exemples de troubles visuels courants :

  • La baisse de l’acuité visuelle réduit la netteté des détails, ce qui complique la lecture et la reconnaissance des objets. Elle peut être due à la myopie, l’hypermétropie, l’astigmatisme ou la presbytie.
  • La cécité partielle ou totale correspond à une perte de vision significative. Une personne peut conserver une perception réduite de la lumière ou des formes, ou n’avoir aucune perception visuelle.
  • Le daltonisme modifie la perception des couleurs, en particulier la distinction entre le rouge et le vert, ce qui complique la lecture d’informations basées uniquement sur des codes couleurs.
  • Le glaucome, maladie chronique de l’œil, entraîne une dégradation du nerf optique, réduisant le champ visuel jusqu’à la vision centrale.
  • La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) affecte la rétine centrale et altère la vision des détails, notamment pour la lecture ou la reconnaissance des visages.

Quels sont les besoins ?

Comme pour les troubles auditifs, la prise en compte de ces situations est essentielle pour développer des sites web qui garantissent une accessibilité optimale, grâce à une conception inclusive adaptée aux besoins de chacun.

2. Bonnes pratiques pour l’accessibilité numérique des personnes atteintes de troubles auditifs

L’accessibilité numérique pour les personnes atteintes de troubles auditifs repose sur plusieurs ajustements essentiels pour compenser l’absence de perception sonore et garantir un accès égal à l’information.

2.1. Sous-titrage et transcription

Selon le RGAA 4.1, tous les contenus audiovisuels doivent être accompagnés de sous-titres synchronisés. Ces sous-titres doivent restituer non seulement les dialogues, mais aussi les sons significatifs (ex. : “[bruit de porte]”, “[rire]”, “[musique dramatique]”). Pour les podcasts, fichiers audio ou webinaires, une transcription textuelle intégrale doit être proposée pour permettre l’accès au contenu à toute personne malentendante.

2.2. Indicateurs visuels

Les informations transmises uniquement par le son doivent toujours être doublées d’équivalents visuels. Par exemple, une alerte sonore doit s’accompagner d’un signal visuel (texte, pictogramme, animation). Le RGAA recommande de ne jamais utiliser uniquement le son pour transmettre une information.

2.3. Langue des signes

Dans certains contextes (services publics, contenus critiques), il est pertinent d’ajouter une vidéo en langue des signes française (LSF). Même si ce n’est pas obligatoire pour tous les contenus, cette pratique renforce l’inclusivité. Toutefois, il est important de noter que la langue des signes française (LSF), comme toute langue signée nationale, n’est pas universelle. Elle est incomprise hors du territoire francophone, ce qui peut limiter la portée des contenus pour un public international. Cela soulève un enjeu d’accessibilité supplémentaire dans un contexte multilingue ou transfrontalier.

2.4. Compatibilité avec les aides auditives

Les sites web ou applications accessibles doivent permettre aux utilisateurs souffrant de troubles auditifs de contrôler facilement les contenus audio (lecture, pause, volume). Bien que les dispositifs physiques tels que les boucles à induction magnétique (transmetteur sonore pour prothèses) ou les amplificateurs sonores concernent davantage les environnements présentiels (bornes interactives, guichets), les développeurs web doivent s’assurer que les lecteurs audio/vidéo intégrés sur leurs interfaces soient compatibles avec ces technologies dans les cas où elles peuvent être utilisées via des connectiques spécifiques. Le contenu en ligne doit donc rester accessible même sans le son, et offrir des solutions de remplacement visuel ou textuel claires.

3. Bonnes pratiques pour l’accessibilité numérique des personnes atteintes de troubles visuels

L’accessibilité numérique pour les personnes atteintes de troubles visuels vise à offrir une navigation fluide, une lecture confortable et une compatibilité maximale avec les technologies d’assistance.

3.1. Contraste et lisibilité

Le RGAA impose un taux de contraste d’au moins 4,5:1 entre le texte et l’arrière-plan pour garantir une lecture optimale, en particulier pour les personnes atteintes de déficience visuelle ou de daltonisme. De même, on recommande d’utiliser un contraste de minimum 3,1:1 entre les éléments d’interface et l’arrière-plan (boutons, champs de formulaire, icônes). Un contraste insuffisant peut rendre le contenu illisible, même pour des utilisateurs sans trouble visuel diagnostiqué, surtout dans des environnements lumineux ou sur des écrans peu calibrés. Par ailleurs, les couleurs ne doivent jamais être le seul vecteur d’information (ex. : indiquer une erreur uniquement par du rouge). Il est également essentiel de proposer une taille de police ajustable, afin que l’utilisateur puisse adapter l’affichage à ses besoins, sans que cela ne détériore la mise en page ou la lisibilité globale du site. Le texte doit rester fluide et accessible, même lorsque le zoom est appliqué jusqu’à 200 %, comme le recommande le RGAA.

Accessibilite Contrast Rgaa

3.2. Structure du contenu et sémantique HTML

Pour permettre l’utilisation de lecteurs d’écran, le code HTML doit être sémantiquement correct : il ne s’agit pas seulement de faire apparaître les bons éléments à l’écran, mais de structurer l’information pour qu’elle soit interprétable par les technologies d’assistance. Pour structurer l’information de façon claire, les développeurs doivent utiliser des balises HTML spécifiques (comme <h1> pour les titres ou <nav> pour la navigation). Cela permet aux lecteurs d’écran de lire la page dans le bon ordre et à l’utilisateur de s’y repérer plus facilement, une exigence essentielle pour l’accessibilité et bénéfique à tous. Chaque page doit impérativement contenir un titre unique et pertinent, reflétant clairement son contenu. De même, l’intitulé d’un lien ou bouton doit indiquer clairement l’objectif lié au clic. En ce qui concerne les tableaux de données, ceux-ci doivent être correctement structurés avec des balises <th> pour les en-têtes de colonnes ou de lignes, et <caption> pour offrir une description contextuelle. Ces éléments garantissent une restitution vocale fidèle et intelligible pour les utilisateurs aveugles ou malvoyants.

3.3. Navigation au clavier

Pour garantir une accessibilité optimale, toute interaction pouvant être réalisée avec une souris doit également pouvoir l’être à l’aide du clavier uniquement. Cette exigence concerne l’ensemble des actions fondamentales d’une navigation web : parcourir les pages, ouvrir les menus déroulants, accéder aux champs de formulaire et soumettre des données. Il est donc indispensable de concevoir les interfaces de manière qu’elles soient entièrement utilisables par les personnes naviguant sans dispositif de pointage. De plus, la visibilité du focus clavier est une condition incontournable : les éléments sélectionnés au clavier doivent présenter un indicateur visuel clair (comme un contour ou un changement de couleur), afin que l’utilisateur sache en permanence où il se trouve dans l’interface. Cette bonne pratique est essentielle pour les utilisateurs aveugles ou malvoyants, mais bénéficie aussi à toute personne préférant le clavier pour des raisons de confort ou d’efficacité. Pour aller plus loin, il est essentiel que l’ordre de navigation au clavier, notamment via la touche “Tab”, suive une logique cohérente et reflète la structure visuelle de la page. Un utilisateur doit pouvoir progresser sans confusion d’un élément à l’autre, dans un parcours fluide et intuitif. La présence de liens d’évitement permet également d’améliorer considérablement l’expérience de navigation : placés en début de page, ils offrent la possibilité de sauter directement au contenu principal, sans avoir à parcourir l’ensemble du menu ou des blocs récurrents. Enfin, il est recommandé de prévoir des zones cliquables suffisamment grandes pour faciliter l’interaction, en particulier sur mobile ou pour les personnes ayant des troubles moteurs. Les WCAG suggèrent une taille minimale de 44×44 pixels, une bonne pratique à adopter aussi souvent que possible même si elle n’est pas exigée par le RGAA.

3.4. Compatibilité avec les lecteurs d’écran

Les lecteurs d’écran comme NVDA, JAWS ou VoiceOver s’appuient directement sur la structure et la sémantique du code HTML pour restituer vocalement le contenu d’une page web. Le RGAA (notamment critères 1.3, 4.1 et 7.1) insiste sur l’importance de la compatibilité avec ces technologies d’assistance. Il est donc indispensable de tester les interfaces avec ces outils afin de vérifier plusieurs éléments clés :

  • L’ordre logique de lecture : le contenu doit être lu dans un ordre cohérent avec la structure visuelle de la page.
  • La pertinence et la clarté des intitulés : les boutons, liens et sections doivent comporter des libellés explicites et compréhensibles.
  • La description des images via les attributs alt : chaque image informative doit posséder une alternative textuelle pertinente, tandis que les images purement décoratives doivent être ignorées des lecteurs d’écran (à l’aide d’un attribut alt="").

Ces tests permettent de s’assurer que la page est pleinement accessible aux personnes aveugles ou malvoyantes, et qu’elle répond aux obligations réglementaires définies par le RGAA.

3.5. Éviter les éléments perturbateurs

Les contenus clignotants ou en mouvement rapide peuvent déstabiliser les utilisateurs ou provoquer des crises (ex. : épilepsie photosensible). Le RGAA précise que les animations doivent être stoppables et qu’il faut éviter les flashs dépassant 3 par seconde.

Il est également recommandé de permettre la mise en pause ou l’arrêt des animations, carrousels ou vidéos automatiques, afin de ne pas gêner la lecture ou détourner l’attention. De plus, les composants graphiques doivent rester stables et cohérents tout au long de la navigation, pour éviter toute désorientation, en particulier chez les utilisateurs ayant des troubles cognitifs ou visuels.

4. Vers une accessibilité numérique universelle

L’accessibilité numérique ne s’adresse pas uniquement aux personnes en situation de handicap : elle constitue un levier d’amélioration de l’expérience utilisateur pour l’ensemble des publics. L’optimisation de la lisibilité, la structuration rigoureuse du contenu et l’amélioration de la navigation profitent à tous : les sous-titres, par exemple, sont utiles dans des environnements bruyants, et les contrastes élevés facilitent la lecture sur mobile ou en extérieur. Une interface claire, bien hiérarchisée, contribue à rendre l’information plus compréhensible, plus rapidement.

Dans ce contexte, l’arrivée imminente de la directive européenne de 2025 sur l’accessibilité numérique renforce la nécessité pour les entreprises et les institutions de s’engager concrètement dans cette démarche. À partir du 28 juin 2025, les administrations du secteur public qui ne disposent pas de service conforme ou de schéma pluriannuel de mise en accessibilité pourront être sanctionnées. Anticiper ces évolutions permet non seulement d’éviter des coûts de mise en conformité tardive, mais aussi d’adopter une approche proactive qui favorise une transition fluide vers un numérique plus inclusif et responsable.

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Cet article s’inscrit dans une série plus large consacrée aux bonnes pratiques en matière d’accessibilité. Prochainement, d’autres types de troubles sensoriels, cognitifs et moteurs seront abordés, avec des recommandations concrètes pour guider les équipes de conception et de développement.

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